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Au procès Péchier, l'"improbable" arrêt cardiaque de Tedy, 4 ans
information fournie par AFP 20/11/2025 à 17:44

Frédéric Péchier, le 9 septembre 2025, à Besançon ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Frédéric Péchier, le 9 septembre 2025, à Besançon ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

C'est la plus jeune des 30 victimes attribuées par l'accusation à l'ex-anesthésiste Frédéric Péchier: la cour d'assises du Doubs a examiné jeudi le cas de Tedy, qui avait 4 ans en 2016 lorsqu'il a subi un arrêt cardiaque lors d'une banale opération des amygdales.

Après deux jours de coma et cinq jours en réanimation, l'enfant a survécu. Aujourd'hui âgé de 14 ans, il assiste aux débats.

Le 22 février 2016, son opération, prévue à la clinique Saint-Vincent de Besançon, n'a pas pu avoir lieu: entré au bloc à 13h30, il a été victime d'un arrêt cardiaque "dans les 10 minutes", a détaillé devant la cour Olivier Verguet, le directeur d'enquête.

"Un arrêt cardiaque chez un enfant", c'est d'une "rareté absolue", a souligné le policier, observant que Tedy, "sans antécédents particuliers", avait "déjà été opéré un an plus tôt pour les végétations et tout s'était passé le plus naturellement du monde".

"Ce qui lui est arrivé, c'était improbable", a renchéri l'avocate générale Christine de Curraize.

L'arrêt cardiaque est déclaré à 13h40, le Dr Péchier arrive à 13h41 pour aider à sa réanimation. La situation est alors "très très catastrophique" et lorsque le Samu arrive, l'enfant est en arrêt cardio-respiratoire, décrit M. Verguet.

Transféré au CHU, le petit garçon "va s'en sortir, fort heureusement" mais cette situation a "véritablement choqué la communauté médicale" et laissé les médecins dans "l'incompréhension", rapporte l'enquêteur.

- "Il attend la vérité" -

"Des interventions d'enfants, j'en ai pratiqué plusieurs milliers, c'est le seul cas que j'ai eu", a comparé le médecin ORL qui devait opérer Tedy, Thierry Loriod.

Frédéric Péchier (G) et son avocat Randall Schwerdorffer au tribunal judiciaire de Besançon, le 8 septembre 2025 ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Frédéric Péchier (G) et son avocat Randall Schwerdorffer au tribunal judiciaire de Besançon, le 8 septembre 2025 ( AFP / SEBASTIEN BOZON )

Des experts ont évoqué des hypothèses d'intoxication à la lidocaïne et au potassium.

En garde à vue, Frédéric Péchier avait contesté toute implication et attribué la réaction du garçonnet à l'utilisation de patchs anesthésiants, ce que l'enquête a écarté.

Près de dix ans plus tard, Tedy, entouré par une quinzaine de ses proches, "attend la vérité", a déclaré à l'AFP l'avocat de sa famille, Archibald Celeyron. Ce collégien, décrit comme "assez réservé", présente des "séquelles physiques, qui le restreignent dans sa pratique sportive" et des "séquelles cognitives", dont des "lenteurs d'apprentissages".

"Pour nous, c'est lui", a déclaré à l'AFP le père de Tedy à propos de Frédéric Péchier.

Un autre cas, survenu dans le même établissement, a été évoqué jeudi: celui de Laurence Nicod, 49 ans, décédée en avril 2016 après un arrêt cardiaque en salle de réveil, à la suite d'une opération de l'épaule.

L'autopsie avait révélé une intoxication à la mépivacaïne et au tramadol.

Cramponnée à la barre, une infirmière s'est rappelée avec émotion de cette femme, "sportive" et "maman", dont le thorax avait été "défoncé par les massages cardiaques et les chocs électriques".

Elle se souvient aussi d'un Frédéric Péchier "impassible" et "détaché" pendant la réanimation.

- "Machiavélique" -

Selon les enquêteurs, l'accusé pourrait avoir voulu viser Catherine Nambot, qui était opérée le même matin que Laurence Nicod. Mme Nambot était la conjointe de Sylvain Serri, un anesthésiste avec lequel il était en conflit.

Après une dispute survenue quelques semaines plus tôt, Frédéric Péchier, très contrarié, avait dit à Sylvain Serri qu'il ne prendrait plus aucune responsabilité au sein de la clinique et lui avait reproché d'avoir "cassé son jouet".

"On s'est posé la question de savoir si le lieu de travail de M. Péchier n'était pas un terrain de jeu pour lui", a avancé le directeur d'enquête à propos de cette curieuse expression.

Pour l'avocat de la défense, Randall Schwerdorffer, faire le lien entre ce différend et des empoisonnements est "aberrant", a-t-il dit à la presse.

"C'est machiavélique mais c'est possible", a estimé Sylvain Serri à la barre. S'il pense avoir été dans le passé "d'une grande naïveté", il a exprimé sa "conviction profonde" que son ancien ami est l'empoisonneur.

M. Serri avait lui même réalisé l'anesthésie de sa compagne. Si elle était morte, sa carrière voire sa vie aurait été anéantie, a souligné son avocate, Me Ariel Lorach. "Cela aurait été une destruction absolument totale", a confirmé l'intéressé.

Frédéric Péchier, 53 ans, est jugé au total pour 30 empoisonnements dont 12 mortels. L'ex-anesthésiste, qui a toujours clamé son innocence, comparaît libre, mais encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu le 19 décembre.

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